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Jacques  Macé

 

Draveil, août 1944

 

Enquête sur un drame de la Libération

 

 

Deuxième partie

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A la recherche de Charles Zimmer

 

Un sous-inspecteur du commissariat de police de Juvisy enquête en novembre 1944 sur les exécutions du 31 août à Draveil. Son rapport du 12 décembre identifie les quatre victimes :

. Bru Léon, ‘‘ex-maire de Draveil, renégat du parti communiste, accusé d’avoir livré à la police vichyssoise la liste des membres de son parti dont plusieurs ont été fusillés. A fondé à Draveil le Parti Ouvrier et Paysan Français (P.O.P.F  *25)’’.

. Germon Guy, 19 ans, domicilié à Ris-Orangis, ‘‘milicien et Waffen SS’’.

. Tribouillois Léon, 30 ans, domicilié à Draveil, couvreur, ‘‘agent de la Gestapo sur lequel  avaient été trouvé des lettres et reçus attestant qu’il était appointé par la police allemande’’.

. Alluin Jacques, 36 ans, domicilié à Crosne, mécanicien-marchand de cycles à Yerres, ‘‘ayant livré aux Allemands son beau-frère qui a été fusillé’’. 

Ils ont été condamnés à mort par un ‘‘Conseil de Justice, constitué du colonel FFI Chavane, dit Chevert, du capitaine FFI Dalicieux, commandant de place, de l’adjudant de gendarmerie Motot de la brigade de Draveil et de l’instituteur Boissier, Lieutenant FFI’’.*26

Ce rapport, qui contient l’essentiel des faits même si certains ne sont pas rigoureusement exacts (on le verra plus tard) ne donne lieu à aucune demande d’information complémentaire de la part de la Justice. Fin 1944, l’affaire semble donc close. Ce sont les recherches de la famille Zimmer qui vont la faire rebondir au plan judiciaire.

 

L’enquête familiale

 

Le vendredi 11 août, Charles Zimmer est venu à Montreuil, avec une camionnette des Eaux et Forêts, pour voir sa femme et son fils. Inquiet semble-t-il, il les quitte dès le matin du samedi 12 et, de ce moment, sa famille n’aura plus de nouvelles de lui. Dès la libération de la région, son épouse et sa sœur Annie, membre de la Résistance parisienne, lancent des recherches. A la Faisanderie de Sénart, occupée maintenant par les hommes de Chavane qui y ont perquisitionné et ont emmené les affaires personnelles de ‘‘M. Labussière’’, elles entendent parler d’une affaire d’espionnage. Par divers recoupements, elles reconstituent le trajet de Charles après son départ de Montreuil : il avait été intercepté à Maisons-Alfort par des Allemands qui l’avaient obligé à les conduire à Sens. Mais la camionnette était tombée en panne à Moret sur Loing. Le dimanche 13 au soir, il avait regagné Corbeil où il avait emprunté à des amis une bicyclette pour rejoindre la Faisanderie. A son arrivée le matin du 14, il apprend que ses deux camions ont été réquisitionnés et emmenés par les résistants de Draveil ; accompagné à bicyclette par l’un de ses agents, il se rend au château de Villiers *27. On perd alors sa trace.

 

A Villiers, Annie Zimmer est reçue par Chavane et Dalicieux qui lui déclarent que Labussière est venu les voir le 14 août pour leur annoncer qu’il quittait la région et qu’il allait rejoindre un maquis du Loiret. « Nous l’avons vu s’éloigner par l’avenue des Tilleuls », ajoutent-ils. Paulette Zimmer se rend sans succès dans tous les chantiers du Loiret où des résistants s’étaient regroupés. Début 1945, la rumeur d’un meurtre circule néanmoins parmi les anciens de la Faisanderie et Paulette Zimmer, son enfant d’un an dans les bras, se rend le 15 février aux bureaux de Chavane, avenue de la Grande Armée. Il lui confirme par écrit que Zimmer, dit Labussière, est bien parti le 14 août vers le Loiret et dit même, tapotant la joue du bébé : « Tu le reverras ton papa ».

 

L’enquête judiciaire

 

Cependant, la rumeur a retenu l’attention du commissaire de police de Villeneuve-Saint-Georges, qui ordonne une enquête. Madame Zimmer porte plainte contre X pour enlèvement et séquestration. Un juge d’instruction de Corbeil est chargé de l’affaire et confie les interrogatoires à un officier de police judiciaire. Interrogé le 12 mai 1945, Chavane avoue enfin l’exécution de Charles Zimmer qu’il a interrogé et considéré comme un espion allemand, qu’il accuse aussi de s’être livré à du marché noir. Surtout, il recule de deux jours les dates des événements afin de situer l’exécution le 17, après le drame du 16 à Paris, afin de la justifier par la crainte de l’arrivée de la Gestapo à Villiers. Et, s’il n’y pas de documents sur le jugement prononcé, c’est parce que ceux-ci ont été pris ou détruits lors de l’invasion du château par les FTP le 2 septembre. Mais ces déclarations sont en contradiction avec les autres témoignages et l’enquêteur conclut dans son rapport au juge, le 3 janvier 1946 : « Il y a lieu de croire que le colonel Chavane et les officiers constitués en Tribunal qui ont prononcé la condamnation à mort de Zimmer ont commis une erreur regrettable ». La famille Zimmer s’attend donc à une inculpation de Chavane mais, le 23 juillet 1946, le juge d’instruction, estimant que l’affaire s’était déroulée dans le cadre d’opérations militaires, prononce une ordonnance d’incompétence et transmet le dossier à la Cour de Justice militaire.

 

Le 2e Tribunal militaire de Paris reprend l’instruction. Ceci ne facilite pas la tâche de l’avocat de la famille Zimmer car il n’est pas possible de se porter partie civile devant un tribunal militaire et d’avoir accès au dossier. L’enquête avait cependant permis de localiser l’endroit du parc où le corps de Charles Zimmer avait été enterré. Celui-ci est exhumé et identifié le 26 octobre 1946 ; l’autopsie pratiquée révèle qu’il a été tué de deux balles dans la tête. Son corps est rendu à sa famille et inhumé à Montreuil, près de celui de son frère Manfred qui s’est suicidé en avril 1946, ne pouvant supporter la suite de drames familiaux découverts à son retour de captivité *28.

Le colonel Hertz, parrain du fils de Charles, prend rendez-vous avec le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire pour expliquer que la famille Zimmer ne veut pas exercer une vengeance mais demande, pour l’honneur de la France, que ‘‘Charles Zimmer soit réhabilité, que des obsèques lui soient faites avec les honneurs militaires, que la Croix de Guerre lui soit décernée à titre posthume, que l’argent et les objets pris par l’équipe de Draveil au chantier forestier de Sénart le lendemain de l’exécution soient rendus à la famille, que le fils de la victime reçoive une indemnité  et que les responsables F.F.I. en cause soient publiquement désavoués’’ *29. Il reçoit des paroles tout à fait rassurantes et la promesse d’un jugement devant la Cour de Justice de la Seine.

 

Au 2e Tribunal militaire de Paris

 

Un officier  du 2e Tribunal militaire de Paris est chargé d’instruire l’ensemble des affaires d’exécutions survenue à Draveil en août 1944, dans le cadre d’une procédure contre X pour ‘‘homicide volontaire’’. En effet, le frère de Madame Bru a également déposé, au nom de sa sœur et de son neveu,  une plainte relative au meurtre de son beau-frère. De même, la mère de Jacques Alluin (l’un des fusillés du 31 août) a également déposé plainte en son nom et au nom de ses deux petits-enfants.

Pendant huit mois, l’instructeur va enquêter sur les accusations portées contre les victimes et interroger la plupart des témoins. Ces auditions, résumées ci-après, permettent de mieux comprendre les agissements des personnes mises en cause et le déroulement des événements.

 

Le cas de Léon Bru apparaît pour le moins complexe. Il crée à Draveil une section du P.O.P.F. *30  et cherche à y recruter ses anciens camarades communistes, ce qui lui permet d’entretenir des relations avec les autorités d’occupation.  Il est soupçonné d’avoir dénoncé au commissaire Gautier, du commissariat de Montgeron *31, des résistants avec lesquels il était entré en conflit. Mais, à la demande de leurs familles, il intervient aussi pour faire libérer des personnes arrêtées pour des faits mineurs. Inversement, un certain monsieur G . . ., à son retour de déportation, obtiendra de la Direction générale de la Police nationale un certificat attestant qu’il avait été arrêté sur dénonciation de Léon Bru. Un agent du commissariat de Montgeron témoignera de liens étroits entre Bru et Gautier. Bru s’occupe aussi du Secours national qui envoie des colis aux prisonniers et, après les bombardements de la gare de Juvisy, il crée une section du Comité Ouvrier de Secours Immédiat (C.O.S.I.) qui apporte une aide aux victimes.

Madame Bru conte longuement l’invasion de son domicile par une vingtaine d’individus le 26 septembre à 11 heures,  l’arrestation de son mari et sa détention au château de Villiers. Le lendemain, toutes les personnes arrêtées sont transférées à la Faisanderie de Sénart, où elles seront interrogées par une commission militaire. Le 31 août, Léon Bru est fusillé à Draveil.

 

Guy Germon, habitant chez ses parents à Ris-Orangis, s’engage en décembre 1943 dans la Ligue des Volontaires français contre le Bolchevisme. Il est envoyé en Alsace pour y subir une formation de Waffen SS. Bénéficiant d’une permission avant son départ sur le front russe, il déserte et se cache chez une jeune fille de Draveil qu’il épouse en juin 1944. Mais il a été vu en uniforme de Waffen SS, est arrêté le 26 août et fusillé le 31.

 

Léon Tribouillois part travailler pour les Allemands à la construction de la base de sous-marins de Lorient. Il est blessé et amputé d’une jambe lors d’un bombardement anglais. Revenu à Draveil, il se répand en propos pro-allemands dans les cafés, a des problèmes de voisinage et est soupçonné d’être un dénonciateur dans les ateliers où il travaille épisodiquement. Il est arrêté le 26 août et fusillé le 31.

 

Jacques Alluin, ancien quartier-maître de l’aviation maritime, marchand de cycles à Yerres, est accusé de trafic de bicyclettes volées. Il est soupçonné d’être milicien du R.N.P. et de dénonciations. Détenu à la Faisanderie, il sera joint aux trois Draveillois et exécuté en même temps qu’eux.

 

La responsable du mouvement Libération Nord à Corbeil et une vingtaine d’anciens employés du chantier de la Faisanderie, identifiés et retrouvés par Madame Zimmer, sont également interrogés. Ils confirment le patriotisme de Charles Zimmer et ses immense efforts pour garantir la sûreté et l’approvisionnement  en vivres du chantier. Dans ces conditions difficiles, Zimmer semble avoir fait preuve d’un autoritarisme mal supporté par certains. Deux employés du chantier font état de soupçons suscités par ses contacts avec des officiers allemands grâce à sa bonne connaissance de leur langue. On évoque aussi quelques cas de marché noir, excédant les besoins du chantier. C’est à ces rumeurs que s’étaient arrêtés Chevert et ses adjoints.

 

Le juge d’instruction militaire cherche alors à comprendre dans quel cadre le soi-disant ‘‘colonel de Chevert’’ avait pendant plusieurs semaines exercé le commandement d’un prétendu ‘‘3e régiment F.F.I.’’ depuis le château de Villiers à Draveil et découvre que ni ce grade, ni cette unité n’ont fait l’objet d’une demande d’homologation par l’un quelconque des mouvements reconnus comme constitutifs de la Résistance française. Chavane aurait agi d’une manière complètement indépendante, en free lance dirions-nous aujourd’hui. En conséquence,  le commissaire du gouvernement près le 2e Tribunal militaire prononce le 14 avril 1947 un réquisitoire d’incompétence :

« Les faits qui se sont passés à Draveil en août 1944 et qui ont eu pour conséquence la mort violente des nommés Alluin Jacques, Bru Léon, Germon Guy, Tribouillois Léon, et Zimmer Charles, ne présentent aucun caractère d’ordre militaire.

Qu’en effet le ou les auteurs des dits homicides ne semblent pas avoir possédé la qualité de membres des F.F.I. et n’avoir pas davantage été accrédités par les Chefs des Organisations régulières ayant autorité dans le secteur ou la région.

Que de toute façon les dits faits ne sauraient être considérés comme étant intervenus dans le service ou à l’occasion du service et qu’il ne peut être contesté qu’ils ont excédé de beaucoup les pouvoirs qui, même en présence de l’ennemi, peuvent être dévolus au commandant d’une force armée.

Qu’il apparaît dans ces conditions que l’on se trouve en présence de faits ressortissants du droit commun .»

Le même jour, le juge d’instruction militaire promulgue une ordonnance d’incompétence reprenant les termes du réquisitoire. Voici l’affaire revenue à son point de départ et le dossier est transmis au Procureur de la République à Corbeil.

 

L’imbroglio judiciaire

 

La réactionn de la justice civile est immédiate. Le 25 avril 1947, le Procureur de Corbeil écrit en termes très vifs au Général commandant la 1ère Région militaire, en demandant que le litige de compétence soulevé par le 2e Tribunal militaire soit soumis à la Cour de Cassation car « cette procédure me paraît relever exclusivement du tribunal militaire (faits commis dans l’exercice de leurs fonctions par des officiers qui avaient  été accrédités par des organisations de résistance et qui ont été depuis reconnus par le Ministère de la Guerre et confirmés dans leur grade) ».

Dès lors, l’affaire est directement suivie par le cabinet du Directeur de la Justice militaire, sous le timbre du général commandant la 1ère Région. Car, plus de deux ans après la Libération, les suites de multiples affaires d’exécutions perturbent la vie politique et encombrent les tribunaux. Il existe en cette année 1947 une volonté politique d’en finir au plus vite avec ces dossiers. Il est fait une très large application de l’ordonnance prise le 6 juillet 1943 par le gouvernement provisoire à Alger. Un biais de procédure permet de faire rouvrir le dossier Draveil par, cette fois, le 1er Tribunal militaire de Paris. Un nouveau juge d’instruction auditionne Pierre Chavane et Henri Boissier. Trois documents nouveaux sont versés au dossier :

. le compte-rendu d’une réunion tenue le 3 juin 1944 au château de Villiers, au cours de laquelle un certain colonel Louis Hervier (pseudonyme d’Armand Heilbronner, membre fondateur de l’O.C.M.) se présentant comme chef des F.F.I. pour les départements de Seine, Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, nomme, en présence du capitaine Pierre Guilbert (qui sera assassiné le 16 août) et de François d’Origny, le colonel de Chevert – déclaré chef d’état-major du colonel Heurtaux (lequel est détenu en Allemagne depuis 1942) - « commandant militaire de toute la région de Seine-et-Oise comprise entre la Seine et la Marne, jusqu’à la limité de la Seine-et-Marne ». Ce document, qui semble ne pas prendre en compte les changements survenus le 1er juin dans l’organisation des F.F.I. (nomination de Rol-Tanguy) arrive à point nommé.

. Une note de Chavane, datée du 28 août 1944, déclarant qu’Henri Boissier est « habilité pour toute enquêtes, exécutions et décisions relatives au bien-être, à la sécurité et santé morale de la population ».

. Interrogé, Henri Boissier déclare que Bru, Germon et Tribouillois ont été jugés par un tribunal de trois membres dont il faisait partie (et qu’il présidait), les deux autres étant un capitaine F.F.I. étranger au pays et l’adjudant commandant la brigade de gendarmerie de Draveil. Il présente une lettre datée du 30 août 1944 :

« Le Chef responsable des F.F.I. de Draveil

à M. le Colonel commandant le 3e Régiment,

J’ai l’honneur de vous informer qu’en ma qualité de chef responsable des F.F.I. de Draveil, j’ai procédé à l’interrogatoire des prisonniers détenus à la Faisanderie.

Ont été reconnus coupables et condamnés à mort : Bru Léon, Tribouillois Léon, Germon Guy.

La sentence sera exécutée demain 31 août.

Veuillez agréer, Monsieur le Colonel , l’expression de mon respect.

                                                           Boissier ».

Boissier ne précise pas comment le cas d’Alluin a été joint à celui des trois autres condamnés. Il indique que le peloton d’exécution de 12 hommes a été commandé par le lieutenant F.F.I. Plaintain (Henri), frère de Michel Plantain, massacré le 16 août à Paris. Il indique même les noms des membres du peloton, dont sept résidants de Draveil et Vigneux.

 

Le 23 mai 1947, Chavane et Boissier sont interrogés ensemble par le juge d’instruction militaire. Chavane  déclare :

« Seul responsable du bon ordre et de la sécurité à cette date, les troupes alliées étant déjà entrées dans Draveil mais n’ayant fait qu’y passer . . . Les esprits étaient tellement montés et la population exigeant de façon si véhémente le châtiment des traîtres qu’il était sûr que de nombreuses personnes arrêtées d’une façon plus ou moins hâtive allaient être lynchées par la foule si celle-ci n’avait pas eu la satisfaction de voir l’exécution des principaux responsables . . . C’est pour cette raison en plein accord avec M. Boissier que nous avons décidé de l’exécution ». Boissier confirme cette déclaration.

Chavane ajoute : « En ce qui concerne l’exécution de Zimmer, je reconnais que c’est sur mon ordre que celui-ci a été exécuté. Je considérais indispensable, étant donné les renseignements que j’avais sur lui et la présence des Allemands, de le faire disparaître ».

Les conditions se trouvent ainsi réunies pour l’application de l’ordonnance du 6 juillet 1943.

 

Le non-lieu

 

Dès le 3 juin 1947, le commissaire du gouvernement établit un réquisitoire proposant un non-lieu aussi bien pour les exécutions du 31 août que pour le meurtre de Charles Zimmer, « attendu que les faits sont légitimés par l’ordonnance du 6 juillet 1943 comme accomplis dans le but de servir la cause de la Libération de la France ». Une ordonnance de non-lieu est promulguée par le 1er Tribunal militaire le 17 juin et le dossier classé. En principe, ce non-lieu est couvert par ‘‘l’autorité de la chose jugée’’,  ce qui nous interdit tout commentaire.

 

Les avocats de la famille Zimmer sont abasourdis par ce dénouement inattendu. Les amis de la famille ne restent pas inactifs : le colonel Hertz s’adresse directement au directeur de la Justice militaire au ministère de la Guerre. Madame Jean Perrot, veuve de l’ancien chef de Charles, qui a entamé une carrière politique en Isère, interpelle le président de la Commission de la Défense nationale à la Chambre des députés. Tous promettent une réouverture du dossier. Mais rien ne se passe. Un juge eut cette réflexion imparable : « Votre mari ne peut pas être réhabilité puisqu’il n’a jamais été condamné ». En 1948, Madame Zimmer abandonnait la lutte du pot de terre contre le pot de fer pour se consacrer à l’éducation de son fils, se retrouvant bien seule car sa belle-sœur Annie Zimmer, traumatisée par la disparition de ses parents et de toute sa fratrie, avait émigré aux États-Unis en mai 1947 après avoir été une active résistante .

 

 

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Que sont-ils devenus ?

 

Démobilisé en janvier 1946, Pierre Chavane reprend ses activités de publicitaire et d’éditeur sous le nom de Pierre-André Chavane, président de Chavane-Publicité, société employant soixante-dix personnes. Il publie en octobre 1946 un ouvrage illustré d’hommage aux généraux américains, anglais et français de la campagne de 1944-1945. Il est titulaire de la Légion d’honneur et de la Médaille de la Résistance avec rosette. Le Who’s Who nous renseigne sur son parcours professionnel. De 1954 à 1957, il préside le Syndicat national des Agences de Publicité et il prendra sa retraite en 1967. Il aimait alors pratiquer le golf et le yachting. Il était membre du Saint-Cloud Country Club, du Yachting Club de Saint-Tropez, du Sporting Club de Monaco et de plusieurs cercles parisiens réputés. Dans les années 1965, Madame Zimmer dissuadera son fils devenu adulte d’aller lui demander des explications, craignant un nouveau drame. Chavane est décédé en août 1973.

Les historiens, aujourd’hui marqués par les mystères de l’affaire Hardy, sont tentés de considérer avec suspicion les deux évasions de Pierre Chavane et d’y voir peut-être des fuites organisées. Il n’y eut cependant aucun doute formulé à l’époque et ces deux évasions figurent même parmi les motifs de la promotion de Chavane dans la Légion d’honneur. En l’absence d’élément de preuve, nous ne pouvons retenir cette hypothèse.

 

Le vicomte François d’Origny cède la propriété de Villiers en 1954 à la Caisse des Dépôts et Consignations qui réalise un lotissement. Le château est devenu en 1990 le Centre Culturel de Draveil et, en 2008, le siège de la municipalité. François d’Origny est décédé en 1976. Son épouse Gilonne lui a survécu jusqu’en 2002, laissant un Journal des événements d’août 1944 (extraits en annexe II) qui constitue l’une des bases de ce récit historique.

 

Henri Boissier, militant SFIO, officier de la Légion d’honneur, sera élu maire de Draveil en octobre 1947 par une coalition de conseillers municipaux opposés au groupe des élus communistes. Il sera réélu en 1953 et restera maire jusqu’en 1959. Il est décédé en 1967.

 

Madame Paulette Zimmer a refait sa vie, conservant au cœur la plaie de sa jeunesse. Son petit-fils Damien Zimmer, fils de Jean-Claude, a relevé le flambeau, rassemblé les archives familiales et nous a communiqué une partie des documents à l’origine de ce récit.  Jean-Claude Zimmer a aujourd’hui huit petits-enfants, arrière-petits-enfants de Charles Zimmer car la vie triomphe toujours de la mort.

Annie Zimmer a fondé une famille aux États-Unis. Elle vit aujourd’hui en Floride (voir Annexe III)

 

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Conclusion

 

Dans nombre de villes de France, dès la Libération et avant la mise en place de nouvelles institutions judiciaires, l’identification et l’arrestation des collaborateurs avérés et des trafiquants du marché noir se transformèrent en épuration sous la forme d’exécutions sommaires, non seulement pour des agissements condamnables mais souvent aussi sur fond de manœuvres crapuleuses et de règlements de compte personnels ou politiques (élimination de futurs adversaires). On estime le nombre de ces exécutions à plusieurs milliers. Dans ce triste bilan, Draveil se distingue par cinq exécutions (une peu avant la Libération et quatre après) pour une population de 10 000 habitants, taux supérieur à la moyenne nationale.

 

Les quatre fusillés du 31 août avaient collaboré et leur arrestation était justifiée mais ils étaient en droit de bénéficier d’un procès. Leur exécution précipitée relève plus de la vengeance que de la justice. La lecture de la somme d’Henri Amouroux (La grande histoire des Français sous et après l’occupation, en 10 tomes), montre cependant que le cas draveillois ne constitue qu’un épiphénomène dans tout un ensemble d’exécutions et de meurtres. Il en va différemment de l’assassinat de Charles Zimmer, tragique méprise et grave erreur d’appréciation de la situation. Malgré le climat d’espionnite qui sévissait alors, le danger de délation et la passion politique ne suffisent pas à excuser cet acte. De plus, les dénégations de Chavane et de ses acolytes pendant neuf mois - avant leurs aveux devant l’évidence - manifestent un insupportable mépris de la personne humaine et de la douleur d’une famille. Oublions donc Pierre Chavane pour faire surgir Charles Zimmer du passé et, à défaut de reconnaissance officielle, lui rendre hommage en le considérant Mort pour la France.

 

                                                                                              

 

 

Sources

. Archives privées de la famille Zimmer.

. Archives privées de la famille Hutteau d’Origny, notamment le journal personnel de la vicomtesse Gilonne d’Origny en août et septembre 1944.

. Archives privées d’Henri Boissier, ancien maire de Draveil.

. Archives de la Justice militaire. Cour de Justice militaire de la Seine. Dossier Draveil.

. Who’s Who in France, 1965.

. Soldats et Généraux des Campagnes d’Europe occidentale, 1944-1945, Bernard Simiot, aquarelles de Siss, éditions P.A. Chavane, Paris, 1946.

. Rol-Tanguy, Roger Bourderon, Tallandier, Paris, 2004.

. Site http://perso.orange.fr/aujourd’hui/draveil/index.html

 

 

Remerciements :

. À Madame Paulette Chateau, veuve en premières noces de Charles Zimmer, à son fils Jean-Claude Zimmer, à son petit-fils Damien Zimmer qui a tenu à faire souvenance de la tragédie de son grand-père et a permis que nous en ouvrions les archives par devoir de mémoire.

. À Madame Françoise Simon, née Hutteau d’Origny, qui a bien voulu que le journal rédigé par sa mère soit exploité dans une optique historique.

. A Mrs Anne Levine, née Zimmer (sœur de Charles), qui aux États-Unis participe au devoir de mémoire envers les victimes de la Shoah.

. À Monsieur Jacques Boissier (†), pour la communication des archives de son père Henri Boissier, ancien maire de Draveil.

 

 

 

 

 

Annexe I

 

Charles Zimmer

 

Aujourd’hui les Pays baltes font partie de la Communauté européenne et on les connaît mieux, mais voici soixante ans c’était le bout du monde. Coincée entre la Pologne et la Russie, soumise à leurs pressions, la Lituanie était parvenue à préserver son indépendance au milieu du XIXe siècle en faisant venir dans ses villes une population d’origine allemande et souvent juive. Avant la guerre de 1914, la capitale Vilna, on dit aujourd’hui Vilnius, comptait trente pour cent de juifs d’origine allemande. La conquête de la Lituanie fut l’objet d’une lutte acharnée entre l’Allemagne et la Russie lors de la Grande Guerre et le pays tomba aux mains des bolcheviques en 1917-1918. Les juifs de Vilna qui avaient pu échapper aux pogroms prirent le chemin de l’exil : ce fut le cas de Sussmann Zimmer et Rachel Lewin, avec leur fils aîné Manfred. Rachel était enceinte de son deuxième enfant. Ils prirent un bateau jusqu’en Hollande, puis gagnèrent l’Allemagne. Ils vécurent quelque temps à Würzburg où Charles naquit en octobre 1919, puis s’établirent à Augsbourg où naquit en 1922 leur fille Anne (dite Annie) et enfin à Francfort où, retrouvant leur métier initial, ils ouvrirent un café-pâtisserie. Leur quatrième enfant, une fille prénommée Ilse, y naquit en 1926.

           

Sussmann Zimmer avait plusieurs frères et une sœur dont les familles avaient suivi un chemin analogue. Cette famille unie menait à Francfort une vie heureuse et assez aisée lorsque le nazisme s’abattit sur l’Allemagne. Bien que les Zimmer ne pratiquaient guère leur religion, la situation devint cependant très dangereuse pour eux. Leurs enfants sont traités de juifs, insultés à l’école et, en 1933, il est interdit aux Zimmer de continuer à exploiter leur commerce. Ils cherchent à émigrer aux États-Unis, passent en France et, dans l’attente de visas, habitent à Montreuil sur Seine chez la sœur et le beau-frère de Sussmann qui s’y trouvent déjà. Finalement, ils décident de rester en France, s’installent à Strasbourg et, en 1937, reviennent à Montreuil où ils ouvrent une pâtisserie. Charles avait fait ses études jusqu’à l’âge de 13 ans à Francfort et il parlait donc parfaitement la langue allemande. Il apprit rapidement le français et le parla bientôt sans accent. Sous le gouvernement de Front populaire, l’intégration des étrangers fut facilitée et toute la famille reçut la nationalité française dès 1937, si bien que Manfred, le fils aîné, fut recruté et partit faire son service militaire, puis la guerre de 1939. Fait prisonnier sur la Ligne Maginot en 1940, il ne reviendra à Paris qu’en 1945.

 

Charles Zimmer est appelé sous les drapeaux le 9 juin 1940, quelques jours seulement avant la débâcle et il est incorporé à Saint-Laurent du Pont (Isère) dans les Chantiers de Jeunesse, camps à encadrement militaire créés par le gouvernement de Pétain et Laval. Ces camps étaient dirigés par des officiers qui pensaient déjà aux conditions d’un relèvement national et éduquèrent les jeunes dont ils avaient la charge dans ce sentiment. Les Chantiers de Jeunesse ont constitué un vivier pour les futurs mouvements de Résistance et on trouvera beaucoup de leurs membres dans les maquis, comme le Vercors ou le Plateau des Glières.

 

Libéré le 15 août 1941, Charles préfère rester en zone libre et trouve un emploi aux Eaux et Forêts de Grenoble, sous la direction de M. Hertz, conservateur en chef qui avait apprécié ses mérites. C’est ainsi qu’il apprend les travaux forestiers et aussi, ce qui lui sera très utile, la méthode de fabrication du charbon de bois pour alimenter les systèmes gazogènes des camions et voitures, en remplacement de l’essence. Pierre Hertz, entré très tôt dans la Résistance, charge Charles Zimmer de ravitailler avec les camions des Eaux et Forêts les groupes de prisonniers évadés et de réfractaires qui se réfugient déjà dans le Vercors. On les appellera bientôt maquisards.

 

A Montreuil, il s’était fiancé avec Paulette Labussière, une voisine de son âge. Celle-ci vient le rejoindre en zone libre et ils se marient le 6 juin 1942 à Cannes, où réside Annie, la sœur de Charles. Un mois plus tard, le 17 juillet, c’est à Paris la Rafle dite du Vel.d’Hiv, l’arrestation de plusieurs milliers de juifs d’origine étrangère qui seront parqués pendant près d’une semaine dans le stade du Vélodrome d’Hiver avant d’être transférés dans les camps de Drancy, de Pithiviers, de Beaune-la-Rolande, puis déportés par convois, en wagons à bestiaux, en Allemagne et en Pologne. Le lendemain 18, des policiers français se présentent chez les Zimmer à Montreuil et arrêtent les parents de Charles ainsi que sa petite sœur Ilse, âgée de 16 ans. Aucun des trois ne reviendra des camps de la mort. Annie, la sœur aînée qui se trouve en zone libre, dans le Midi de la France, recevra une carte de sa petite sœur Ilse, postée à Drancy : « Ne t’inquiète pas, nous allons bien ». Ce sera le dernier signe de vie de la famille Zimmer.

 

Le jeune couple s’installe à Grenoble où Charles juge plus prudent de changer d’identité. Le frère de Paulette, André Labussière, avait été fait prisonnier en 1940 et se trouvait dans un camp en Allemagne. En utilisant un acte de naissance de son beau-frère, Charles Zimmer se fait établir de vrais-faux papiers d’identité au nom d’André Labussière et c’est sous ce nom que nous l’avons trouvé à la Faisanderie de Sénart. En effet, Pierre Hertz a recommandé Charles à son collègue Jean Perrot, responsable départemental du réseau Franc Tireur en Isère. Il devient l’un de ses adjoints, chargé en particulier de filtrer les jeunes gens, réfractaires au Service du Travail Obligatoire en Allemagne (le S.T.O.), qui viennent s’engager dans les maquis du Vercors. Des espions allemands tentent de s’infiltrer parmi eux et la connaissance par Charles de la langue et des coutumes allemandes se révèle utile pour les détecter. Le 29 novembre 1943 dans l’après-midi, Charles a rendez-vous avec Jean Perrot quand, arrivant en vélo à l’endroit prévu, il repère la présence à proximité de deux Traction Avant (les voitures utilisées par la Gestapo). Il passe dans la rue sans s’arrêter. Jean Perrot venait d’être arrêté ; il fut interrogé, torturé et assassiné. Le soir même, Charles et son épouse enceinte de sept mois quittent leur domicile. Hertz fera muter l’agent ‘‘Labussière’’ aux Eaux et Forêts de la région parisienne et c’est ainsi qu’il sera affecté à la Faisanderie de la forêt de Sénart, logé dans le joli pavillon de chasse construit par le comte de Provence, le frère de Louis XVI. Son épouse vit chez ses parents à Montreuil où elle accouche le 14 février 1944 de leur fils prénommé Jean-Claude. Charles les y rejoint chaque fin de semaine.

           

Depuis la guerre, la gestion de la forêt avait été laissée à l’abandon. Charles Zimmer montre rapidement ses capacités et dès la mi-janvier 1944 il est nommé chef de chantier, chargé de réorganiser le travail. Il crée un atelier de fabrication de charbon de bois pour alimenter les gazogènes de la région. Il recrute comme agents des Eaux et Forêts des prisonniers de guerre évadés et des jeunes gens réfractaires au S.T.O., le Service du travail obligatoire en Allemagne institué par le gouvernement de Vichy et les autorités allemandes. Bientôt une trentaine d’hommes se trouvent réunis à la Faisanderie, les uns en situation régulière, les autres sous de fausses identités. Une dizaine viennent de Corbeil, une dizaine d’autres sont originaires de Paris et les autres d’un peu partout dans la région parisienne. La gestion de ce groupe devient la tâche principale de Charles car il a à s’occuper du ravitaillement, à se procurer de fausses cartes d’alimentation, à établir des certificats de travail. Il entre en relation avec les résistants du mouvement Libération Nord à Corbeil.

Au mois d’avril 1944, les autorités d’occupation ordonnent un contrôle général des ouvriers employés dans les ateliers et chantiers de la région. Charles cache les plus compromis et réussit, en présentant les contrats de travail qu’il a établis, à faire en sorte  que le contrôle se déroule bien. Certains observent à cette occasion qu’il connaît la langue allemande et peut parler d’une manière détendue avec les Allemands, les mettant en confiance. Beaucoup lui en seront reconnaissants mais cela a pu aussi, semble-t-il, inspirer à quelques-uns un sentiment de défiance. Nous avons vu plus haut ce qu’il en advint.

 

 

 

 

Annexe II

 

Journal de Gilonne d’Origny (extraits)

 

Ce Journal a été retrouvé récemment par les enfants de la vicomtesse d’Origny, décédée en 2002. Il couvre les années 1942, 1943 et 1944 et ne comporte, la plupart du temps, que des informations de nature familiale ou privée, sous forme d’agenda. Mais il devient beaucoup plus précis et politique à l’approche de la Libération.

 

12 janvier 1944 : Pierre Chavane est arrêté une seconde fois par la gestapo et s’enfuit dans les Champs-Élysées.

 

13 janvier : Goûter Mme Barry. Arrivée de Pierre/Chevert.

 

Puis :

 

Samedi 12 août 1944

Exécution dans la glacière d’un gestapiste de Vigneux. On l’enterre dans le parc.

 

Lundi 14 août

Le PC FFI installé dams l’aile Est est camouflé en hôpital. Arrivée de 4 aviateurs américains.

 

Mardi 15 août

Les Alliés débarquent en Provence. Ici exécution d’un Allemand. Franky part vers Saint-Chéron en mission vers le G.Q.G. allié.

 

Mercredi 16 août

Un camion à nous parti chercher des armes à Paris est attiré dans un guet-apens rue Leroux et ses 9 occupants sont tués.

 

Jeudi 17 août

Canonnade toute la nuit. Alerte SS. Montons la garde toute la journée et toute la nuit.

 

Vendredi 18 août

Les Américains sont à Etampes, Orléans, Rambouillet. Révocation par le colonel de Chevert du maire de Draveil, M. Barry. Occupons la poste. Prétendons être hôpital de typhiques pour éloigner les Boches.

 

Dimanche 20 août

Vais à Yerres voir le Cdt Ferté (Foucher). Les Américains passent la Seine à Mantes.

 

Lundi 21 août

Loi martiale à Draveil. Les Américains passent la Seine près de Fontainebleau.

 

Mardi 22 août

Les Boches prennent des vélos pour fuir. Prise de Morsang.

 

Mercredi 23 août

Infanterie américaine à Brétigny. Les Boches en déroute campent devant la maison. Le Cdt Ferté se décide à créer un PC chez lui à l’instar de celui d’ici.

 

Jeudi 24 août

Les Américains à Ris-Orangis.

 

Vendredi 25 août

Juvisy libéré à 6 h. du matin. Franky revient de sa mission. Je pars avec nos aviateurs américains cachés chez nous pour Juvisy. Je prends contact avec l’E.M. américain. Je conduis un détachement à Athis-Mons en face de Port-Courcel, puis vais au G.Q.G. américain à Brétigny. Les Américains nous donnent des armes que nous faisons passer en barque jusqu’à 1 h. du matin. Les Américains sont à Champrosay.

 

Samedi 26 août

Libération de Draveil. La foule envahit la cour et y traîne les collabos et les traîtres. Fais partir tout le monde. Vais à Savigny auprès de l’E.M. américain.

 

Dimanche 27 août

Te Deum à l’église de Draveil. Sur le parvis, le curé reçoit Pierre [Chavane], l’ancien et le nouveau maire et nous.

 

Lundi 28 août

A déjeuner, le général Vallin, Lt Corot, Jeannette.

 

Mardi 29 août

Vais au ministère de la Guerre voir Pierre de Chevigné. Visite ici de Richard de Dampierre de la Division Leclerc.

 

Mercredi 30 août

Vais voir Vallin, Revers et Palewski. Pars pour le Mont-Dore. Ne dépasse pas Montargis. Les Boches sont encore au sud de la Loire.

 

Jeudi 31 août : pas de note (retour  vers Draveil).

 

Vendredi 1er septembre

Arrestation ici de Baumann qui avait été nommé par Ferté commissaire de district. Il a écrit une lettre dans laquelle il disait que Ferté raconte que Pierre a signé des chèques sans provision. Longuet à Viry-Châtillon est arrêté par les communistes.

 

Samedi 2 septembre

Allons avec Pierre Chavane au Ritz déjeuner avec Palewski. Pendant ce temps, Villiers est occupé par des FTP et des FFI envoyés par Rol-Tanguy et Foucher, qui pillent tout nous dit-on, et empêchent tout le monde de sortir.

Vais voir le général Vallin, chef d’E.M. de Revers.

 

Dimanche 3 septembre

Chez le chef d’E.M. de Koenig. Visite au colonel Peretti, chef de la Sécurité nationale.

Pierre [Chavane] voit Rol-Tanguy au ministère de la Guerre.

 

Lundi 4 septembre

Pierre va rue des Feuillantines au 2e Bureau où il est arrêté par Rol-Tanguy. Vais chercher 35 gardes mobiles à Champs qui viennent garder Villiers. Pierre est relâché de la rue des Feuillantines.

 

Mardi 5 septembre

Allons à Villiers avec Pierre. Procureur de la République à Corbeil.

Des gens rodent dans le parc et les G.M.R. [gardes mobiles] tirent.

 

Mercredi 6 septembre

Pierre va à 14 h. 30 rue des Feuillantines et en sort à 18 h. 30. Rentrons avec lui à Villiers.

 

Jeudi 7 septembre

M’occupe des 7 fusillés du camion.

 

Vendredi 8 septembre

Rebatet vient au bureau de Pierre.

 

Dimanche 10 septembre

Pierre passe en revue les 250 hommes de la Folie qui vont défiler à Versailles.

 

Mercredi 13 septembre

Franky et Pierre vont voir le sous-préfet à Corbeil. Enquête de l’E.M. FFI ici sur la perquisition et le pillage du 2 septembre.

 

Puis la vicomtesse Gilonne d’Origny quitte quelques jours Draveil pour aller en province retrouver ses enfants.

 

Annexe III

 

Anne Zimmer-Levine

 

Des quatre enfants Zimmer ( Manfred né en 1915, Charles né en 1919, Anne née en 1922, Ilse née en 1926), Annie était la plus proche de son frère Charles. En raison des nombreux déplacements de ses parents de 1933 à 1937, elle est mise en pension en Alsace, puis dans une école pour les enfants d’émigrés ayant fui l’Union soviétique, ouverte par une princesse russe à Quincy sous Sénart. En 1939, elle se trouve à Lardy dans une maison d’enfants du Rayon de Soleil, œuvre recueillant des enfants de familles réfugiées, juives notamment. En 1940, à l’approche des Allemands, la maison est transférée à Nîmes, puis à Cannes, où Annie passe son baccalauréat en 1942, assiste au mariage de son frère Charles et apprend la déportation de ses parents et de sa sœur.

Repérée par la police malgré sa fausse identité, elle revient à Paris en 1943, protégée par un proche du Rayon de Soleil, Jacques Monod, chercheur à l’Ecole Normale Supérieure et membre actif de la Résistance . Jacques Monod recrute Annie Zimmer comme laborantine au Laboratoire de Biologie de l’E.N.S. de la rue d’Ulm et l’emploie également comme agent de liaison de son réseau, affilié aux F.T.P.F. Ce réseau adhère aux Milices Patriotiques et, à ce titre, Annie effectue plusieurs liaisons entre son groupe et le PC du colonel Rol-Tanguy à Denfert-Rochereau.

 

Elle assiste ensuite sa belle-sœur Paulette pour tenter de retrouver son frère Charles puis travaille comme journaliste à France d’abord, chargée d’interviewer les survivants des camps de concentration. Elle ne peut éviter le suicide de son frère Manfred auquel, à son retour de stalag, elle doit apprendre les conditions des décès de leurs parents, de leur frère Charles et de leur sœur Ilse. Musicien, sensible, Manfred était le plus intellectuel des enfants Zimmer.

Pour échapper à cette fatalité, Annie Zimmer décide d’émigrer aux États-Unis en mai 1947. Sur le bateau, elle fait connaissance de Seymour Levine, étudiant américain qui revient d’Italie. Ils se marient quelques mois plus tard.

 

Elle reprend à Lakewood (Georgia) ses études de lettres, obtient un Masters et enseignera pendant plus de vingt ans la langue française aux États-Unis. Son fils Joël Levine est, en 2008, chef d’orchestre du Oklahoma City Philarmonic Orchestra. Retraités, Anne et Seymour Levine vivent actuellement en Floride, où le petit-fils de Charles Zimmer les a récemment rencontrés. Avec ses enfants et ses proches, Anne Levine a toujours refusé et refuse d’évoquer la disparition de ses parents, de ses frères et de sa sœur. Toutefois, pour le projet américain de Mémorial des victimes de la Shoah, elle a accepté en 1998 d’enregistrer les souvenirs de sa jeunesse avant la Guerre de 1939 et de ses activités de résistante durant l’Occupation. Dans ce document, elle témoigne de ses vifs sentiments d’amour de la France et de sympathie pour les Français, de reconnaissance envers tous ceux qui l’ont aidée et particulièrement le professeur Jacques Monod, enfouissant au fond de son cœur le souvenir des drames de Drancy et de Draveil, qui ont brisé sa jeunesse et changé sa vie.

 

 

 

NOTES *

​

1 - Avenues Emile Fruchart, Lucien Malaviole et Léon Sorbier à Draveil ; rue Maurice Marion à Vigneux sur Seine ; rue Jean Isoard à Montgeron ; rue Pierre Guilbert à Yerres.

2 - Pseudonyme peu discret, évoquant le Premier Empire !

3 - Parmi ceux-ci, le vicomte et la vicomtesse d’Origny dont il avait fait la connaissance en septembre 1941, deux mois avant son arrestation.

4 -Aux passionnés d’histoire, cette seconde évasion de Pierre Chavane rappelle, d’une certaine manière, celle de René Hardy lors de l’arrestation de Jean Moulin à Caluire le 21 juin 1943. Evitons néanmoins les rapprochements hâtifs.

 5 - Se plaçant sous la protection du vicomte et de la vicomtesse d’Origny, dont il connaissait l’engagement et le patriotisme.

6 - Trois ans plus tard, quand il aura à justifier de son action, Chavane prétendra avoir été mandaté par un responsable de l’O.C.M. pour prendre le contrôle militaire de toute la zone de Seine-et-Oise comprise entre la Seine et la Marne. Nous reviendrons plus tard sur ce point.

 7 -  Le général de Gaulle a vivement reproché à Leclerc d’être allé, dans cette circonstance, un peu trop loin.

 8 - Sur la commune d’Etioles.

9 - Archives municipales de Draveil, état civil.

10 - L’après-midi de son intronisation, le 16 mai 2007, le président Nicolas Sarkozy a tenu à venir se recueillir en ce lieu et à rendre hommage aux trente-cinq victimes.

 11 - Dans la confusion régnant en ce mois d’août 1944, le pseudo-capitaine Jack réussit à inspirer confiance tandis que ‘‘Labussière’’ éveille les soupçons simplement parce qu’il parle allemand. Marcheret fut fait prisonnier par les Américains au Danemark, sous l’uniforme allemand. Remis aux autorités françaises, il sera jugé, condamné à mort et exécuté le 20 décembre 1949.

12 - Voir Mémoire et Images de Draveil au XXe siècle, CLHD, 2004.

13 - Ces détails et ceux qui suivent sont extraits du journal tenu par la vicomtesse d’Origny (voir en annexe II), document exceptionnel qui recoupe parfaitement les faits connus par ailleurs et les complète.

 14 - Service de renseignement du Bureau des opérations stratégiques de l’Armée américaine. En 1946, l’OSS changera de nom et deviendra la Central Intelligence Agency, la fameuse CIA.

 15 - Vraisemblablement Michel Brault, alias Jérôme, responsable du Service Maquis au Comité d’Action Militaire du Conseil National de la Résistance (COMAC).

16 - Valeureux combattant de la Première Guerre mondiale, instituteur à Maisons-Alfort et maire-adjoint de Draveil de 1936 à 1940, maire de 1947 à 1959 : retrouver sa notice biographique in Draveil, chemins d’antan, rues du présent, CLHD, 2001, p. 194.

17 - L’Etat-Major interallié s’était installé à l’hôtel Ritz. Des écrivains correspondants de guerre, tels Ernest Hemingway et Joseph Kessel, en occupaient fermement le bar.

18 - Fin des extraits du journal de la vicomtesse d’Origny.

19 - L’AMGOT (Allied Military Government of Occupied Territories). Des billets de banque en francs sur le modèle du dollar avaient même été imprimés et devaient être mis en circulation forcée. Le général de Gaulle piqua une telle colère que les Américains y renoncèrent.

20 - Selon des témoignages, Chavane a tenté à plusieurs reprises de confisquer les armes automatiques en possession des FTP . Voir http://perso.orange.fr/aujourd’hui/draveil/index.html

21 - En faisant fusiller Léon Bru, l’ancien maire communiste, Chavane ne cherchait-il pas à donner un avertissement aux communistes locaux afin de mieux imposer son pouvoir ?

 22 -  Alfred Malleret, alias Joinville, militant syndicaliste et communiste, résistant, chef de l’état-major FFI lors la Libération de Paris. En septembre 1944, le général Malleret-Joinville est nommé à la tête d’une direction FFI au ministère de la Guerre. Dans l’attelage Chavane-Chevert et Malleret-Joinville, on se demande bien qui surveillait qui ! Chef de cabinet de Maurice Thorez, ministre d’Etat dans le gouvernement du général de Gaulle en 1945, Malleret-Joinville sera député communiste de la Seine jusqu’en 1958.

23 -Service de renseignement.

24 - Citation, comportant attribution de la Croix de Guerre avec étoile d’argent,  du lieutenant François d’Origny à l’ordre du jour de la 4e D.M.M., le 30 juin 1945 : « Officier de réserve d’un grand mérite, brave et courageux. Entré dans la Résistance en mai 1941, n’a cessé d’animer jusqu’au débarquement allié, en août 1944, la résistance de Seine-et-Oise, protégeant des réfractaires et des parachutistes, effectuant des missions de renseignement à travers les lignes sans souci des dangers auxquels il s’exposait. Engagé en décembre 1944 au régiment de Franche-Comté, a participé à la campagne d’Alsace. A pris part avec la 4e division Marocaine à la campagne de Rhin et Danube et d’Autriche. A fait preuve en toutes circonstances de belles qualités militaires ».

25 - Le Parti Ouvrier et Paysan Français fut créé début 1941 par d’anciens élus du Parti communiste, opposés au pacte germano-soviétique, puis favorables à une certaine collaboration avec l’Allemagne. On estime que 16 des 76 députés communistes de 1936 en ont été adhérents ou proches.

26  - Archives de la Cour de Justice militaire de la Seine (CJM).

27 -  Il veut récupérer un camion pour aller remorquer la camionnette en panne à Moret.

28 - Cimetière de Montreuil, 6e division, 3e section, 12-33.

29 - Archives famille Zimmer.

30 - Parti Ouvrier et Paysan Français, collaborationniste.

31 - Haï pour sa répression des mouvements de résistance, le commissaire Gautier fut assassiné le 12 novembre 1943 devant le château des Bergeries à Draveil. Lire Mémoire et Images de Draveil au XXe siècle, pages 237-238.

32 - Le C.O.S.I. était une émanation du P.O.P.F. et du R.N.P. qui avait pour objectif de dresser la population contre les Anglais qui bombardaient des civils.

33 - Elle cite les noms de quatre meneurs qu’elle connaissait. Parmi eux, deux habitants de la Cité Paris-Jardins, connus comme militants communistes.

34 - Léon Bru ne semble pas avoir été traumatisé par cet interrogatoire et il pensait être transféré à Paris, selon M. Barguiller, pharmacien et ancien président de la Délégation spéciale (maire) de Vigneux en 1940-41, détenu temporairement à la Faisanderie, qui fut vraisemblablement la dernière personne à s’entretenir avec lui.

35 - Rassemblement National Populaire créé par le collaborateur Marcel Déat.

36 - Vraisemblablement pour les mettre en confiance et éviter des enquêtes.

37 - Archives Cour de Justice militaire de la Seine.

38 - Le recensement des pièces du dossier Draveil comporte une mention ‘‘lettre du ministre’’. Cette lettre est absente du dossier.

39 - Ordonnance prise en prévision de ce qui allait se passer à la Libération : « sont déclarés légitimes tous actes accomplis postérieurement au 10 juin 1940 dans le but de servir la cause de la libération de la France, quand bien même ils auraient constitué des infractions au regard de la législation appliquée à l’époque ».

40 - Archives CJM. L’argument du risque de lynchage justifie le transfert des détenus de Villiers à la Faisanderie le 27 août. Son application au 30 août est  plus spécieuse.

41 - La décision de jonction du cas Zimmer à celui des quatre autres s’appuie sur les affirmations pour le moins  tendancieuses de Chavane et de Dalicieux lors de leurs aveux du 12 mai 1945 : « Zimmer, au dire de son entourage, avait des relations très suivies avec les autorités allemandes, s’absentant fréquemment pour des missions plus ou moins longues (Chavane) ». « Zimmer avait avoué sa véritable identité et sa nationalité allemande (Dalicieux) ». En fait, Charles Zimmer s’absentait pour se rendre chez son épouse et il était né en Allemagne, sans en avoir la nationalité.

42 - Lire en annexe III les informations recueillies sur les activités d’Anne Zimmer.

43 - René Hardy, membre du réseau Combat, fut arrêté par les Allemands puis relâché. Présent à Caluire lors de l’arrestation de Jean Moulin,  il parvint à s’évader. Soupçonné d’avoir trahi et d’avoir livré Jean Moulin à Klaus Barbie, il fut jugé par deux tribunaux en 1947 et 1950, et acquitté deux fois. L’affaire Hardy a fait l’objet de très nombreux ouvrages.

 45 - 10 000 selon certains historiens. Malgré les travaux du Comité d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, le recensement et la classification des quelque 200 000 victimes civiles, hors combattants et déportés, des années 1942, 1943 et 1944 restent imprécis et toujours difficiles à établir. Lire Henri Amouroux, La grande histoire des Français  sous et après l’occupation, tome 9, chapitre 2 : Les exécution sommaires, essai de bilan.

46 - Sussmann était le fils de Simon Zimmer qui, en photo, ressemblait furieusement à Victor Hugo !

47 - Voir annexe III.

 48 -  Agent français de la Gestapo. Nous n’avons pas d’information sur ce personnage.

  49 - Cette mention  indique que la vicomtesse a seulement été informée que l’homme arrêté (Charles Zimmer) était un espion allemand. Le lien avec le débarquement de Provence permet de confirmer la date du 15 août pour cette exécution (et non le 17 comme Chavane tentera de le faire croire plus tard).

 50 -  Epoux de la narratrice.

 51 -  Les sept résistants, plus le guide Gaston et un passant.

52 - Aimé Barry, agent d’assurances nommé président de la délégation spéciale de Draveil en janvier 1943. Personnage falot qui n’a pas marqué l’histoire de la commune.

53 - R. Foucher, dit Ferté, commandant le sous-secteur Agro des FFI de la Région parisienne  (la zone Agro comprenait une vingtaine de communes à la limite de la Seine-et-Marne et des actuels départements de l’Essonne et du Val-de-Marne).

54 -  Effectivement  R.  Foucher (Cdt Ferté) possédait une propriété à Valenton dans laquelle il transféra le poste de commandement du sous-secteur  Agro  (décision du 30 août 1944).

55 - François d’Origny a donc été absent de Draveil du 15 au 25 août 1944. Il a certainement fourni aux autorités américaines les informations nécessaires pour la libération de la rive droite de la Seine.

 56 - Général Martial Vallin (1917-1967), chef des forces aériennes de la France Libre, qui s’empara du ministère de l’Air, boulevard Victor, lors de la libération de Paris.  François d’Origny, qui avait effectué la campagne de 1939-1940 dans un organe de liaison entre l’Armée de l’Air française et la Royal Air Force, devait le connaître.

57 - Sans doute l’aide de camp du général Vallin.

 58 - Une amie, également engagée dans la Résistance (marquise de Brissac, née princesse d’Arenberg).

59 - Pierre de Chevigné (1909-2004), colonel, homme politique, commandant militaire des régions libérées. Compagnon de la Libération. Secrétaire d’Etat à la Guerre de 1951 à 1954. Ministre de la Défense nationale du 14 mai au 1er juin 1958.

 60 - Général Revers, chef de l’Organisation de Résistance de l’Armée (O.R.A.) à partir d’octobre 1943.

61 - Gaston Palewski (1901-1984), homme politique. Directeur du cabinet du général de Gaulle de 1942 à 1946. Puis ambassadeur, ministre de la Recherche scientifique en 1962.

  62 - Gilonne d’Origny ne se trouvait donc pas à Villiers le 30 août, lors de la ‘‘cour martiale’’ organisée par Chavane, qui condamna à mort Léon Bru, maire communiste de Draveil de 1936 à 1940, et trois collaborateurs. Ils furent exécutés le 31 août à 9 heures du matin.

  63 - Personnage non identifié.

  64 - Henri Longuet, président de la délégation spéciale de Viry-Châtillon.

  65 - Henri Tanguy (1908-2002), colonel Rol, chef régional des F.F.I. jusqu’à la libération de la région parisienne. Puis chargé, sous les ordres des généraux Revers et Koenig, de l’intégration des F.F.I. dans l’armée régulière.

 66 -  Alerté par Foucher et les FTP, Rol-Tanguy enquête sur les événements de Draveil.

 67 - Reconnaissance des corps. Etablissement des actes de décès. Transfert des dépouilles.

 68 -  Il s’agit certainement de Georges-Louis Rebattet, alias Cheval, officier de cavalerie, dirigeant de l’O.C.M, coordinateur des régions FFI au sein du Comité d’action militaire (COMAC), Compagnon de la Libération. A ne pas confondre avec Lucien Rebatet, écrivain et collaborateur notoire, en fuite avec Pétain à Sigmaringen. Condamné à mort par contumace en 1946.

 69 -Château de Draveil où sont regroupés les F.F.I. qui s’engagent dans l’armée pour la durée de la guerre.

70 - Il s’agit du professeur Jacques Monod, qui recevra le Prix Nobel de Biologie en 1965, l’un des ‘‘pères’’ de la découverte de l’ADN.

71 -Milices patriotiques : formations paramilitaires crées par le Front National en juin 1944 pour contribuer à la libération du territoire. Elles seront dissoutes en octobre 1944.

72 -Tous leurs oncles, tantes et cousins ont péri dans les camps, à l’exception d’une cousine qui, rescapée d’Auschwitz, s’est établie en Australie.

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